Editions de l'Amandier
Ce roman a été écrit en 2007, en résidence d'écriture à Rochesson (Vosges), à l'invitation de la résidence d'auteurs La Pensée sauvage (Olivier Dautrey) et grâce à une bourse du CNL.
Accueil par la Communauté de Communes des Vallons du Bouchot et du Rupt, avec l'aide de la DRAC Lorraine, du Conseil Régional de Lorraine, du Conseil Général des Vosges, du Rectorat de Nancy-Metz, de la Bibliothèque de prêt d'Epinal, du Parc Naturel Régional des Ballons des Vosges.
En manipulant la tête d'un mannequin retrouvé dans le grenier de la maison familiale, Louis tombe sur un paquet de lettres adressées à Régine, sa mère... Il ouvre les enveloppes et ce qu'il y découvre le renverse. Comment a-t-elle pu lui cacher ça ?
Un frisson le traverse, il porte la main à sa bouche, se retient de crier, pas ça, pas cette horreur qui monte des tréfonds de son être, pas ce dégoût, pas lui...
Un roman qui revisite les codes du secret de famille.
La presse :
"Luc Tartar était le premier écrivain en résidence, invité à passer l'année à Rochesson par l'association La Pensée sauvage [...] Le puzzle romanesque s'est mis en place. Et a débouché sur un très beau livre, "Sauvez Régine", quête de la mère qu'on est sur le point de perdre et qu'on veut ressaisir avant le grand départ. Interrogation existentielle aussi sur soi, sur ses préférences profondes révélées dans la douleur, qui rappellent sans la franchise brutale un Rinaldi... Une douleur d'être autre, le secret qui lui est lié, mais qui est aussi un écho."
Guillaume Mazeaud, L'Est Républicain, 17 juin 2011.
Magnifique texte, tout en sensibilité, où les sentiments humains sont portés à leur paroxysme.
La liberté de l'Est, Danielle Barret.
Le texte est excellent, empreint d'une sensibilité à fleur de peau. Les traits d'humour font mouche.
L'Est Républicain, Francis Valentin.
"L'écrivain Luc Tartar nous propose une nouvelle perle littéraire. Un récit sensible, maîtrisé. Un vrai bon roman."
Nicolas André, La voix du Nord, 7 juin 2011.
Un extrait :
La porte a cédé. Le caillou qui en empêchait l’ouverture a laissé sur le sol une trace nette, quart de cercle parfait. A côté, un liquide marron s’échappe d’une bouteille en PVC. Des bidons, des pots de peinture. Il se bouche le nez, ça pue la pisse de chat ou la souris, c’est plein de poussière et de toiles d’araignée. Sous la fenêtre, un buffet aux portes et aux tiroirs cassés, d’où dégueule un amoncellement qui court jusque dans l’escalier : le poste à galène qu’il a aperçu tout à l’heure, un crucifix, un vase, des outils, des boîtes, des chiffons, la vieille corbeille à pain... Il monte. Un matelas, des rideaux, un tas de vêtements. C’est un capharnaüm. La clarté qui vient des fenêtres facilite sa progression. Surprise à chaque pas. Une chaise, des montants de lit, un vieux vélo, des disques. Des disques ! Depuis quand n’est-il pas venu ici ? Ce foutoir mériterait un bon rangement, mais qui pour s’y attaquer ? Autant faire passer Emmaüs. Il s’accroupit devant les trente-trois tours, retrouve avec émotion les vaches des Pink-Floyd, s’empare de l’album, se relève, renverse un petit buste en plâtre qu’il n’avait pas vu à ses pieds. Sous le buste, un trou dans le plancher qui donne directement dans sa chambre. Il replace le buste sur le trou, n’a pas envie de se retrouver avec des souris dans son lit. Il avance. Un vieux fauteuil, une table en osier, une machine à coudre Singer. Il la reconnaît. Régine l’a eue dans sa chambre, un temps. Sous une fenêtre, un tas de gravats. Brusquement, il tourne la tête et sursaute. Quelqu’un. Contre le mur du fond. Un regard noir et pénétrant. Qui est là ? Des orbites vides le fixent sans bouger. Entre l’armoire et le conduit de cheminée. Pierre ? Il est tétanisé, entend battre son cœur, se retient de respirer. Et au moment où il s’attend à voir bouger l’enfant, il reconnaît la silhouette. C’est le mannequin, celui que Lucienne installait dans la vitrine du magasin pour présenter les articles et les vêtements pour enfants. Un mannequin de bois et de carton-pâte, haut comme un garçon de six ans et particulièrement réaliste. Une antiquité fragile, Vincent et Louis n’avaient pas le droit d’y toucher et Régine cachait les clés du grenier. " C’est le mannequin de Pierre ", disait-elle. Pierre, cet oncle qu’ils n’ont pas connu, mort à dix ans, qu’on voit dans l’un des albums de famille photographié avec son mannequin. Il le tient par le cou. Tous deux ont la même taille et sont habillés pareillement, en vareuse de marin et bonnet à pompon. On dirait qu’ils sont frères jumeaux. Et pourtant non. L’un est un enfant, l’autre un mannequin aux yeux de verre. Louis observe les orbites vides, qui donnent au visage du presque enfant un air spectral et effrayant. Il approche la main, caresse les cheveux, sent rouler la poussière sous ses doigts, et soulève délicatement la tête en carton. Un fil casse à la base du cou. Rongée par les ans, la couture se défait et les points cèdent les uns après les autres, lentement la tête se sépare du corps. Un œil de verre tombe, petit ploc, suivi par une enveloppe que Louis cherche à rattraper mais qui glisse le long de sa jambe et vient s’échouer à ses pieds...